samedi 7 décembre 2019

Pour en finir avec le dénigrement systématique de l'automobile

Crédit photo : https://mobilit.belgium.be

Ça commence à bien faire, ce dénigrement facile et injuste de la voiture et des constructeurs. Soit il vient des pouvoirs publics, et c'est un moyen de masquer leur propre incompétence à offrir une mobilité abordable et efficace aux citoyens ; soit il vient de citoyens, et c'est une manière de se déresponsabiliser et de s'infantiliser. Je pense que chacun est encore maître de ses actes et de ses achats. Et qu'il faut garder une part de rêve dans sa vie ! L'automobile est une formidable invention. Belle, source de plaisir pour les cinq sens, de liberté et de plaisir, elle ne doit pas être jetée aux oubliettes ! Simplement être mieux utilisée.

Quand un fou sort dans la rue avec un couteau de cuisine et égorge des gens, est-ce de la faute des fabricants de couteaux ? Quand l'alcoolisme fait des ravages, est-ce qu'on interdit la publicité pour le vin et les foires de dégustation ? On peut très bien aimer le bon vin sans être alcoolique, et se comporter de manière responsable. Il faut arrêter d'infantiliser les gens, et plutôt les informer.
Beaucoup de gens vont au salon pour rêver, car l'automobile, c'est aussi du design, de belles formes, du progrès technologique, y compris en matière de dépollution. Mais il ne faut pas se fourvoyer, il est bien plus efficace de mieux utiliser la voiture que de la rendre moins polluante. Aucun carburant ne sera jamais aussi efficace que le fait de travailler de la maison, de faire du covoiturage, d'utiliser les transports en commun ou le vélo.
Par ailleurs, les politiques ont le jeu facile de s'attaquer aux constructeurs. Ceux-ci ne les ont pas attendus pour développer des moteurs toujours plus sobres et moins polluants :
  • des véhicules électriques dès le début des années '90 ;
  • l'injection directe pour consommer moins à la même époque ;
  • le filtre à particules supprimant 99% des particules fines proposé sans brevet par Peugeot dès 2000 ;
  • alors que VW installait des logiciels tricheurs, certains constructeurs comme PSA installait un catalyseur anti oxydes d'azote sans supplément de prix et sans que cela lui soit imposé dès le début des années 2010 ;
  • ...
Il ne tient qu'à nous de changer notre mobilité. Il ne tient qu'à nous d'optimiser notre utilisation de la voiture.
Il ne tient qu'aux politiques de remplacer le système des voitures de société par un autre avantage moins consumériste et dommageable pour l'environnement, et de faire en sorte que l'offre en transports en commun arrête de se dégrader en qualité et quantité, mais au contraire devienne enfin une véritable alternative à la voiture. Idem pour l'utilisation du vélo, qui doit encore être rendue moins dangereuse !
Alors, un peu de courage, prenons nos responsabilités et ne nous arrêtons pas à des stéréotypes faciles pour mettre la responsabilité sur les autres !!

En ce qui me concerne, puisqu'il faut commencer par balayer devant sa porte :
  • j'ai choisi un boulot où je travaille de la maison 3 jours par semaine ;
  • j'ai choisi une maison dans une zone où il y a des transports en commun afin de ne pas être trop dépendant de la voiture ;
  • j'ai mis mes enfants dans une école proche de la maison, où je vais les chercher à pieds ou à vélo les trois jours où je travaille de la maison ;
  • j'ai pris le train pendant de nombreuses années, excellent système mais avec encore une belle marge d'amélioration pour être crédible ;
  • j'ai fait du covoiturage avec un collègue pendant deux ans, pratique super convivial et pratique qu'il faudrait bien plus encourager et organiser ;
  • chaque fois que j'ai eu l'occasion de choisir une voiture, j'ai privilégié la solution la plus écologique possible en fonction de mes besoins, moins de 95g par CO2 pour l'actuelle et la prochaine ;
  • je prends le vélo autant que possible pour les petites courses et déplacements autour de chez moi ;
  • je rationalise mes déplacements en privilégiant les commerces locaux, en regroupant les trajets et en évitant les déplacements inutiles ;
  • quand je pars en vacances et que c'est possible, je choisis des destinations proches ne nécessitant pas d'avion ;
  • et comme encore une fois la voiture est une cible facile (car ça justifie superbement bien les taxes écologiques, qui ne sont PAS utilisées pour développer les transports en commun, et cela culpabilise les citoyens), je ne perds pas de vue qu'il y a aussi et surtout la pollution CACHÉE des transports insensés que l'on fait faire aux marchandises, et j'achète en seconde main et local chaque fois que c'est possible ;
  • sans parler de la pollution numérique tout aussi invisible mais loin d'être anecdotique : je limite mon utilisation du streaming (Netflix,...).

Sachant tout cela, je revendique mon droit de rêver devant de belles carrosseries, et de savourer de temps en temps quelques kilomètres sur des petites routes de manière responsable et mesurée, loin des bouchons et des excès de certains.

Je pense que l'on doit simplement passer d'une ère du tout à l'automobile, à une ère bien plus durable et conviviale où la voiture n'est plus qu'un moyen de transport parmi d'autres, avec beaucoup de travail à distance, un retour des petits commerces indépendants de proximité, du covoiturage convivial qui crée des liens et sécurise, des transports en commun efficaces, une belle place pour un vélo agréable et sécurisé, le tout dans un esprit solidaire et tourné vers les autres.

Toutes les cartes sont dans les mains des politiques et des citoyens pour y arriver.

mardi 24 septembre 2019

Une cerise verte sur le gâteau de la mobilité





Faut-il acheter une voiture électrique ? En voilà une belle préoccupation de consommateur soucieux de consommer au mieux. On est en 2019, on ne peut plus fumer dans les restaurants depuis longtemps, ni dans les voitures en présence d'enfants, mais on peut encore enfumer joyeusement les cyclistes, les piétons et soi-même, puisqu'il ne faut pas croire que l'on est protégé des particules fines, oxydes d'azotes et autres brols dans l'habitacle de son SUV(1).  Alors, entre un plan black-out et le report de la mise hors service d'une centrale nucléaire fissurée, on décrète l'interdiction progressive des véhicules thermiques et on nous pousse à passer à l'électrique, en Wallonie (2) comme ailleurs en Europe (3). 

S'il est vrai que les chiffres relatifs aux décès causés par la pollution de l'air sur la santé (500.000 personnes chaque année en Europe !) font froid dans le dos, le raccourci qui consiste à imposer la voiture électrique et à interdire la voiture thermique est plus que douteux.

La voiture est un bouc émissaire tout trouvé : excellente excuse pour fabriquer de nouveaux véhicules, et taxer autant les nouveaux (via les taxes à l'immatriculation) que les anciens (via des pénalités). Comme si produire un véhicule n'était pas polluant et gourmand en ressources, ce qu'est particulièrement la production d'un véhicule électrique (deux fois plus émettrice de CO2 que la fabrication d'un véhicule thermique(4)). On oublie que certaines personnes roulent très peu (à peine quelques milliers de kilomètres par an) et que le recyclage de leur véhicule thermique et la production d'un nouveau sera bien pire que si ils avaient gardé leur ancien véhicule quelques années encore en roulant peu. Sous couvert d'écologie, on fait tourner l'économie.

Nous voici complétement égarés entre intérêts économiques et sanitaires. Quels sont ces polluants qui tuent en Europe ? Principalement les particules fines, qui provoquent tout de même des problèmes cardiaques, respiratoires et des maladies du cerveau (Alzheimer, Parkinson,...). Cependant, l'automobile n'en est pas la principale émettrice (5), et il conviendrait de prendre également des mesures contraignantes pour l'industrie, le reste du transport, la production d'énergie et l'agriculture si l'on voulait vraiment purifier la qualité de notre air et ainsi sauver des vies. Il en va de même pour les oxydes d'azote, qui ont également des effets néfastes pour la santé et sur l'environnement (problèmes respiratoires, pluies acides,...) et qui sont bien trop présents dans l'air dans nos villes.

Mais plutôt que de simplement changer de véhicule, ne serait-il pas bien plus efficace de changer de système, d'arrêter de gaspiller en permanence et pour tout ? Nous travaillons loin de nos domiciles, nous achetons de la nourriture et des marchandises qui viennent de l'autre bout du monde et qui parfois ont fait plusieurs continents avant d'arriver à nous (de la crevette envoyée en Afrique pour être épluchée au smartphone fabriqué en Asie et emballé en Amérique). Nous surproduisons pour finalement jeter énormément. Nous déplaçons 1500 kg de tôle et de plastique pour déplacer 70 kg de chair alors que nous avons un réseau dense et abordable (bien que certes perfectible, mais là aussi c'est une question de volonté politique !) de transports en commun. Nous voulons sans cesse du neuf pas cher car fabriqué dans des pays pauvres alors que le marché de seconde main regorge de vêtements, jouets et autres objets pas chers et en bon état. Nous voulons partir vite et loin en vacances en avion alors qu'il y a plein de coins magnifiques à portée de voiture, ou même de vélo. Nous avons peur des autres, de leur parler, de les rencontrer alors que nous pourrions discuter ensemble le temps d'un voyage en train ou en covoiturage. Même nos déchets, nous les envoyons sur d'autres continents, via des bateaux très lourds bien polluants, pour des résultats environnementaux et sociaux catastrophiques comme les décharges électroniques du Ghana(6).

Nous avons tellement de choses à changer, une telle marge de progression et nous nous fixons sur des détails comme la voiture électrique. C'est une cerise sur le gâteau de la mobilité durable : 
  1. supprimer les transports superflus en favorisant l'économie locale ;
  2. favoriser le télétravail et la décentralisation des lieux de travail afin de permettre à tous d'éviter d'importants trajets domicile-travail qui n'ont aucune plus-value ;
  3. quand le transport est inévitable, l'optimiser en organisant le covoiturage, en favorisant les transports en commun et la mobilité douce (vélo, marche,...).
  4. combiner les trajets intelligemment (comme pour le covoiturage, la technologie peut être une alliée précieuse à ce niveau).
Arrive alors cette cerise… qui n'est pas tout à fait mûre ! En effet, si la voiture électrique a pour elle le fait de ne rien émettre comme polluant là où elle roule et d'émettre moins de CO2 qu'une thermique sur l'ensemble de son cycle de vie, deux qualités qui sont loin d'être négligeables, elle doit cependant encore essuyer quelques plâtres(7) :
  • l'extraction des métaux rares comme le lithium, qui se fait très loin de chez nous (Chine, Congo,...) et dans des circonstances désastreuses, tant sur le plan social (travail des enfants, exploitation liées à des conflits,...) qu'environnementales (rivières asséchées, sols détruits, impacts sur la faune et la flore) ;
  • l'origine de l'électricité et la pollution liée si elle n'est pas verte (ce qui est généralement le cas, on est surtout sur du nucléaire en France et en Belgique) ;
  • la menace des pénuries d'électricité brandie chaque hiver dans le contexte de sortie du nucléaire ;
  • la problématique du recyclage des batteries, qui est loin d'être prouvé.
Gageons que ces soucis seront évités avec son développement, via par exemple :
  •  des organismes indépendants qui certifieraient la filiaire de production et de recyclage comme le fait Fairphone pour les métaux de ses smarphones(8) ;
  • des lois qui favoriseraient d'avantage l'énergie verte et mettraient en place leur généralisation progressive (et en attendant une réflexion… éclairée sur le nucléaire qui malgré tout n'émet pas de CO2 ni de particules fines) ;
  • des progrès technologiques en cours et à venir qui permettraient de se passer de métaux rares et très lointains comme le lithium pour les remplacer par des matières plus usuelles et locales.
Donc oui, la voiture électrique peut constituer un progrès… mais ce n'est qu'une cerise, commençons par le gâteau !